L’Ultracrépidarianisme

Jeudi 29/04/2021 - temps de lecture 3 minutes  :

        Savez-vous expliquer le fonctionnement de la fusion nucléaire ? Le processus de création d’un vaccin ? Le protocole régissant les intelligences artificielles qui nous surveillent ? Mis à part certains camarades physiciens, ingénieurs ou chercheurs en biologie, je pense que peu d’entre vous sont en mesure de décrypter les phénomènes scientifiques cités précédemment ! Néanmoins, vous avez tous un avis sur ces questions ! Certains sont pro-vaccin et anti-nucléaire. D’autres sont peut-être fermement opposés à l’intelligence artificielle. 

        Le philosophe contemporain des sciences Étienne Klein rappelle que ce phénomène est de l’ultracrépidarianisme. A travers ce court article, nous allons essayer de décrypter cette notion, particulièrement importante en situation de COVID-19.

Caricature de BirdsDessines.fr sur l’ultracrépidarianisme médiatique 

        Lors d’une interview donnée au journal Brut, M. Étienne Klein s’est exprimé au sujet de l’ultracrépidarianisme. Il décrit l’ultracrépidarianisme (c’est long à écrire à chaque fois) comme un phénomène banal. En effet, pour lui, ces genres de comportements sont parfaitement banals dans des discussions entre amis autour d’un café. Par exemple, imaginons. Lors d’un dîner, vous pouvez prendre position pour Israël et contre la Palestine (La DGSI me surveille maintenant 😝) alors qu’en vérité, vous n’êtes pas politologue. Vous ne connaissez pas les deux camps parfaitement, ni les acteurs, de plus, vous ne vous êtes jamais rendu sur place. Nous pouvons donner un autre exemple. Chers camarades d’EELV, vous êtes contre l’énergie nucléaire, mais comme le dit Étienne Klein chez Brut, êtes-vous capable de me décrire le fonctionnement d’un réacteur à fission ? Cela est assez peu probable, néanmoins, vous donnez votre avis dessus. 

Étienne Klein en interview pour Brut 

        Pour en savoir plus sur l’ultracrépidarianisme, un peu d’étymologies ! Ultracrépidarianisme vient de la locution latine Sutor, ne supra crepidam, qui signifie littéralement : « Cordonnier, ne parle pas plus haut que la chaussure ». Cette expression équivaut à l’expression moderne « À chacun son métier, les vaches seront bien gardées ». 
        
        De plus, comme le soulignent très justement David Dunning et Justin Kruger, il faut se méfier de la « maladie du Nobel ». En effet comme le précisent ces deux psychologues américains, les individus talentueux, cultivés, ou compétents dans un domaine peuvent avoir tendance à se sentir doués... partout. Sûrs de leurs arguments d’autorités (c’est à dire leur savoir), ils sortent imprudemment de leur champ réel de compétence, au risque de défendre publiquement des théories infondées. Je suis sûr que parmi vous certains sont des spécialistes en arguments d’autorités bandes de Schopenhauer ! 😆

        Et maintenant, est ce qu’on ne ferait pas une peu de PHILOSOPHIE POLITIQUE ? 😊 En philosophie politique, l’ultracrépidarianisme peut s’assimiler à de la démagogie. La démagogie est le régime miroir de la démocratie (voir Aristote La Politique). De plus, nous pouvons nous demander si tous nos chers hommes politiques, qui décident durant la pandémie, ne devrait pas laisser leurs places à des scientifiques ? En effet, pour lutter contre la COVID-19 les médecins sont les plus qualifiés ! Je vous laisse donc réfléchir sur cette question: Faut-il que les politiques laissent leur place à des gens plus qualifiés qu’eux ? 

        Je vous donne néanmoins mon avis. 
NON. Car le politique doit choisir. La force du politique aujourd’hui descend de la notion de philosophe roi de Platon (voir notre article sur Platon : le premier père). Le politique est celui qui a le plus d’armes intellectuelles pour choisir. Néanmoins, s’il lui manque des connaissances il doit être éclairer par un expert ! En revanche, ce n’est pas cet expert qui doit décider. 



Donald Trump, 45e président des Etats-Unis, donnait souvent son avis sur des sujets qu’il maîtrisait peu, comme le réchauffement climatique



Illustrations :


Commentaires

  1. Je suis d'accord avec vous sur le fait que les politiques sont plus aptes a trancher quand il s'agit de décision d'ordre politique. Cependant, je soutiens encore plus le faite que les scientifiques sont plus là pour guider qu'uniquement pour éclairer.
    Cependant, c'est un très bel article et on remarque une nette amélioration dans la rédaction,
    Bravo !!

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